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Par LIBÉRATION.FR
«Merci», «Enfin», Hollande ce «sauveur»… A l’exception notable de la presse algérienne (lire ici), la presse africaine, particulièrement les titres d’Afrique de l’ouest, applaudit sans réserve en ce début de semaine la décision française de s’engager sans plus attendre au Mali.
Urgence il y avait bien et l’armée malienne était incapable d’y faire face seule, arguent la plupart des titres. «On n’a vraiment pas besoin d’être sorti de la prestigieuse école militaire de Saint-Cyr pour se rendre compte que laissée à elle seule, l’armée malienne ne pourrait, dans le meilleur des cas, que se contenter de la partition de fait de son territoire», écrivait ainsi le quotidien burkinabé l’Observateur Paalgadans son édito de dimanche – où l’on apprend au passage que Serval, nom de code de l’opération, est le nom d’un félin africain. «Au moins tous les pays membres de la Cédéao [communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest, ndlr] devraient se mobiliser de manière conséquente pour traquer ces rebelles jusque dans leurs derniers retranchements. Si cela n’est pas fait de manière prompte, grand sera le risque d’enlisement.»
«Tout le monde aurait voulu que la raclée aux agresseurs fût le seul fait des forces maliennes», accorde dans son édito de lundi le quotidien malien Le Républicain, mais «l’important, c’est le soulagement des populations de Mopti qui s’apprêtaient à abandonner leurs foyers la mort dans l’âme, l’espoir que la leçon de Konna soulève dans les autres zones occupées, le coup d’arrêt porté à la progression d’un récusable projet de réislamisation. Depuis jeudi donc, dans nos chaumières comme dans nos palais, le sauveur du Mali s’appelle François Hollande».
Le Journal de Madikama, autre titre malien, lance aussi un franc«merci à la France». «Pour que les gens accourent à l’aide, dit l’adage, il faut que tu tiennes le fauve qui t’a agressé par la crinière. Cette guerre n’est pas une guerre locale ou interne ; c’est une guerre mondiale contre le terrorisme», écrit Ibrahima Koïta. «Depuis deux décennies, au Mali, le budget qu’on devait consacrer à l’armée, une vraie armée, celle de “nos besoins”, a été engagée à d’autres fins, sans doute pour l’apaisement du front social. Une erreur à ne pas recommencer. Merci à la France d’être venue prendre notre fauve par la tête.»
«Laissez Hollande tranquille !», clame même Le Pays, autre quotidien burkinabé dans un énergique édito : «Quel autre comportement responsable aurait pu adopter la France face à une horde d’islamistes qui était sur le point de descendre sur Bamako comme un essaim de criquets ravageurs sur un épi de mil ?»
«Nous sommes tous maliens !»
Certains soulignent néanmoins toute l’âpreté de la situation, qui voit le Mali contraint d’appeler à l’aide son ancien colonisateur, lui-même obligé une fois de plus de jouer les pompiers en Afrique. Ainsi pour Vincent Foly, du quotidien béninois La Nouvelle tribune, l’intervention française prouve que «la France plus que n’importe quelle autre puissance est le super gendarme de l’Afrique, ceci, par la faute de nos dirigeants. (…) Il est à regretter que plus de cinquante ans après nos indépendances, les solutions aux problèmes de l’Afrique continuent d’être décidées ailleurs qu’en Afrique. Ceci par la faute de ses dirigeants plus préoccupés par leur maintien au pouvoir que par les intérêts des populations.»

Essentiellement spectateurs, les pays voisins du Mali soulignent aussi que, derrière la crise malienne, leur propre sécurité est en jeu. Exemple au Sénégal, qui envoie un bataillon de 500 hommes au Mali dans le cadre du renfort coordonné par la Cédéao. «Nous sommes tous maliens !», titre Sud quotidien. «L’Afrique ne sera que ce que les Africains en feront. Le combat de la lumière contre les ténèbres qui se mène en ce moment au Mali est aussi le nôtre. En ce sens, il nous revient d’accoucher d’une Afrique forte, capable de construire son avenir, d’arrêter d’être la spectatrice d’une histoire confisquée par les autres, pour se transformer en architecte de son propre avenir. En ce sens, le Sénégal a bien raison d’envoyer des troupes sur le terrain.»
Le Quotidien, autre quotidien sénégalais, l’exprime encore plus clairement ce mardi : «Le Mali ne peut pas être en proie à un cauchemar engendré par un terrorisme islamiste, le Sénégal dormir tranquillement dans son lit. Il est donc normal que nos “Diambars”[«champion», en wolof, ndlr] participent à éloigner le Mal du Lit sénégalais. (…) C’est d’un élan national, sous-régional et international dont les Maliens ont besoin pour que la plaie extrémiste qui dégage une puanteur religieuse ne s’infecte jusqu’à la gangrène au moment où les populations africaines ont surtout besoin de pain pour manger, de l’eau pour boire et de la paille pour dormir.»

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